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Un an à Saint-Louis ou pourquoi cette ville est importante

EL PAÍS réalise depuis le Sénégal une couverture spéciale pour raconter la vie quotidienne d’une ville africaine

Des bateaux de pêche dans les eaux de Ndiebene-Gandiol, près de Saint-Louis (Sénégal).
Des bateaux de pêche dans les eaux de Ndiebene-Gandiol, près de Saint-Louis (Sénégal). SEYLLOU/AFP/Getty Images

Il y avait plusieurs candidates en lice. Mais celle qui a été choisie c’est Saint-Louis, au Sénégal, une ville moyenne, de près de 250.000 habitants. Parce qu’elle possède tous les éléments socio-économiques nécessaires pour raconter aujourd’hui, à travers elle, ce qui se passe en Afrique en général, dans des questions si significatives comme les migrations, le développement durable, la pêche, le changement climatique, l’éducation, la pauvreté, la sécurité alimentaire, l’égalité de genre, la technologie, l’art et la culture ou la santé globale. C’est un voyage pour la connaitre et pour nous rapprocher ainsi de la vie quotidienne des Africains.

Déclaration d’intentions

L’idée de suivre la vie quotidienne d’une ville africaine a toujours été là, endormie, entre les plans de la rubrique Planeta Futuro depuis qu’elle est née le 16 janvier 2014 (oui, nous venons de fêter notre cinquième anniversaire!). Notre premier reportage nous l’avons publié depuis le Niger, un des pays les plus pauvres au monde. Il s’appelait Empieza el camino, et il a été réalisé par José Naranjo et Alfredo Cáliz. Il racontait pourquoi et d’où venaient déjà les migrants; comment ils vivaient, qu’est-ce qui les poussait à migrer et comment ils réalisaient cette traversée si difficile et parfois fatale. On croyait alors que le mouvement de personnes depuis l’Afrique allait être un des sujets les plus importants du XXème siècle. Et ça en est un.

Cela a été une déclaration d’intentions. Planeta Futuro est né pour raconter sur place la pauvreté, les problèmes de sécurité alimentaire, de santé globale, de mortalité infantile, d’accès à l’éducation. La rubrique essaierait de dévoiler les progrès, l’innovation, la force infinie des femmes africaines, la résilience de ses agriculteurs et ses pêcheurs, la vitalité et le changement de cap et de mentalité de ses jeunes... Et ainsi, d’autres sujets quotidiens des pays les plus défavorisés dont on ne sait rien ou presque rien. Tout cela fait partie de l’ADN de cette rubrique du quotidien EL PAÍS depuis toujours. Des milliers d’articles ont déjà été publiés non seulement sur ces migrations en Afrique ou depuis l’Afrique, mais aussi sur les 17 Objectifs de développement durable de ce que l’on appelle l’Agenda 2030, la feuille de route des Nations Unies pour un monde plus habitable et digne.

Ce qui nous poussait alors nous pousse toujours dans ce projet qui voit le jour cinq ans après, en ce mois de février de l’année 2019, et que nous avons appelé Un an à Saint-Louis (#SaintLouis365 sur les réseaux sociaux). Cette initiative journalistique inédite essaie de rapprocher et de faire connaître l’Afrique réelle et aux multiples facettes aux lecteurs espagnols à un moment où le rejet de celui qui est différent ou pauvre, le racisme, la xénophobie et le populisme augmentent de façon alarmante au travers le monde. La meilleure façon de l’éviter c’est la connaissance d’autrui et le dialogue.

Raconter la vie de ceux qui ne migrent pas

Les rédacteurs de Planeta Futuro et d’autres rubriques de EL PAÍS suivront tout au long de l’année 2019 le devenir de Saint-Louis, ville frontière entre le Sénégal et la Mauritanie, symbole de migrations. Depuis celle-ci et ses alentours des milliers de personnes sont parties vers les îles Canaries lors de ce que l’on connait comme la crise des cayucos de 2006 et 2007. En raison de ces migrations et de sa stabilité politique, le Sénégal est aujourd’hui un des pays de l’Afrique subsaharienne les plus liés à l’Espagne en matière sécuritaire, de coopération au développement, de présence d’entreprises et d’échanges commerciaux.

L’objectif est de la faire connaitre depuis l’intérieur, depuis tous les secteurs et les points de vue possibles; utiliser tous les formats à notre portée pour raconter ses défis de développement et de progrès, les dilemmes, les traditions ou les innovations... Les villes moyennes grandissent et jouent un rôle important dans la démographie et les mouvements de personnes en Afrique (dont la population – 1,27 milliards – doublera d’ici 2050). Nous voulons contribuer ainsi depuis EL PAÍS, le plus grand média international en castillan, à faire connaitre nos voisins (la côte africaine se trouve à seulement 14 kilomètres de la côte espagnole). On a déjà écrit (mais pas trop) sur ceux qui ont quitté un jour le continent, la diaspora, et qui vivent maintenant parmi nous sur le sol européen. Ou sur ceux qui tentent d’arriver en Europe ou en Amérique ou en Asie depuis l’Afrique de maintes façons, souvent dramatiques. Mais rien ou presque rien sur cette grande majorité, ceux et celles qui restent chez eux et se battent pour avoir une vie digne et/ou pour contribuer à développer leur pays.

Chaque semaine, nous publierons chronologiquement des articles, des reportages, des vidéos, du contenu sur les réseaux sociaux... tout ce qui aidera à décrire Saint-Louis, à la mettre en valeur. Journalistes, blogueurs, étudiants d’espagnol, ONG, intellectuels et autres citoyens de Saint-Louis ont été invités à participer à cette couverture tout au long de ces mois dans un exercice d’union entre les deux rivages de la Méditerranée et l’Atlantique. Chargé de défis et de difficultés, le moment pour suivre Saint-Louis est parfait car du gaz et du pétrole ont été découverts près de ses côtes, et tout peut changer très vite vu qu’il s’agit d’un pays, le Sénégal, qui jusqu’à présent ne disposait pas de grandes ressources minérales. On y respire de l’espoir. Et nous souhaitons être là-bas, pour le voir et pour le raconter.

Pourquoi Saint-Louis?

Nous avons choisi cette ville sénégalaise parce que...

  • Elle est chargée d'histoire. C'était une zone d'esclaves libérés et une des premières colonies européennes en Afrique de l'Ouest (1659). Elle a joué un rôle important dans l'indépendance du Sénégal.
  • L'île sur laquelle elle se trouve fait partie du patrimoine classé de l'Unesco, mais la plupart de ses bâtiments historiques sont très endommagés.
  • Son emplacement, à la frontière avec la Mauritanie, en fait d'elle une porte du désert. Elle est située à l'embouchure du fleuve Sénégal qui se jette là-bas dans l'océan. Et aussi parce qu'elle est près de l'Espagne: le Sénégal se trouve à quatre heures de vol.
  • C'est une ville moyenne, de près de 250.000 habitants. La région, du même nom, a trois départements et une population de 500.000 habitants. Elle a un grand poids agricole marqué par le fleuve Sénégal.
  • Elle possède un large secteur de pêcheurs dont la vie est très difficile et dont les conditions de travail et l'environnement sont très précaires. Elle est déjà touchée par le changement climatique.
  • Elle se débat entre la pauvreté, les migrations, le manque de travail et d'infrastructures et les rêves d'un avenir meilleur (qui n'arrive jamais). Aujourd'hui il y a de l'espoir: on a découvert du gaz et du pétrole.
  • Le manque de travail et d'opportunités l'ont transformée en un symbole de l'immigration des jeunes (les embarcations de ce que l'on connait comme la crise de cayucos de 2006 et 2007 sont parties depuis ses côtes jusqu'aux îles Canaries).
  • Elle a une université influente, dans laquelle d'ailleurs on parle espagnol. Le Département de Langues Appliquées et celui de Philologie compte 17 professeurs et 2.000 étudiants d'espagnol. Dans tout le Sénégal 240.000 personnes étudient le castillan.
  • Elle est vibrante et génératrice de culture, d'art et de festivals de musique, musées de photographie... Les sujets d'économie, d'éducation, de femmes, de santé et d'enfance foisonnent.
  • Elle a des parcs naturels uniques et de nombreux oiseaux.
  • Elle affronte d'énormes défis en matière de développement, protection de l'enfance (enfants talibés), droits des femmes et accès aux services de base. Tous des sujets inclus dans les Objectifs de développement durable qui sont abordés habituellement par Planeta Futuro.
  • La religion a un poids spécifique important dans la ville. Les confréries y sont très présentes et l'Islam, la croyance majoritaire, marque la vie quotidienne de ses habitants.
  • Elle a beaucoup de potentiel; c'est une grande ville qui pourrait être améliorée avec des investissements, de la volonté et de bonnes politiques; elle pourrait être un grand port; elle est une destination touristique populaire, elle a un mélange de population et une population internationale... Un esprit spécial.

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