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África No es un paísÁfrica No es un país
Coordinado por Lola Huete Machado
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Sénégal: Tout peut arriver!

Photo: Reuters/Joe Penney

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Les derniers événements au Sénégal, avec leur décompte macabre et une violence sans cesse ascendante, ont ouvert une porte: celle des lendemains incertains où toute une nation se dirige vers son sort et pour l'un des rares moments de son histoire n'est plus sûre de ses valeurs démocratiques, républicaines, acquises si durement au cours de ses dernières décénnies. Une ligne a été franchie, dans ce pays qui pendant longtemps faisait la fiérté de ses citoyens du fait qu'il n'y avait jamais eu de coup d'état, jamais de violences inter-éthniques ou même religieuses. Des vies sont tombées sous le coup de la répréssion policière et pour la première fois, les sénégalais ont l'impréssion d'être proches du chaos, que tout ne tient plus qu'à un fil, que dorénavant tout peut arriver.

L'étranger qui arrive au Sénégal en ces derniers jours de campagne se demandera sûrement si les images d'émeutes qui passent sur quasiment toutes les grandes chaînes du monde proviennent bien d'ici. Tout y est calme. N'eûssent été les affiches de candidats qui pilulent un peu partout sur les murs du pays, on oublierait presque qu'on s'apprête à élire un nouveau président ici. Les populations vaquent à leurs occupations quotidiennes et à part quelques endroits stratégiques où elle est postée, la police n'envahit pas les rues. Mais cela n'est sans doute que temporaire car depuis quelques semaines, les manifestations ici, même celles qui touchent beaucoup de localités du pays en même temps, sont déclenchées d'une minute à l'autre. Partant très souvent d'une zone de la capitale Dakar, elles s'étendent petit à petit à d'autres quartiers jusqu'à ce que plusieurs villes du Sénégal s'embrasent. Et bien sûr à chacune de ses émeutes, la réponse policière est très lourde et se solde souvent par des morts, jusqu'ici 11 parmi les manifestants et un du côté des forces de l'ordre.

Au cours de ces dernières semaines, on a pu voir des chars de la police foncer dans un tas de manifestansts, rouler sur certains et en tuer, des manifestants prendre au piège un policier et l'achever à coup de briques sur la tête, des balles à blancs et réelles atteindre des passants, des grenades lacrymogènes toucher des personnes aux mauvais endroits et signer ainsi leur arrêt de mort, d'autres arrêtés et torturés. Tout cela sans que les autorités administratives et religieuses du pays ne s'en émeuvent. Et les manifestants ressortent toujours le lendemain sans être sûrs qu'ils retourneront chez eux sains et saufs. Pour l'oeil averti qui suit ce qui se passe au Sénégal depuis quelques années, cette escalade de la violence est sans surprise parce que depuis 2000 tout nous y préparait. Depuis la mort de Balla Guèye, étudiant tombé en 2001 suite à une bavure policière dans l'enceinte de l'université, beaucoup d'autres sénégalais sont morts entre les mains de la police de Wade sans que justice ne soit vraiment rendue pour au moins un seul d'entre eux.

Le gouvernement de Wade ferait donc mieux de chercher là-bas (et en une multitude d'autres choses d'ailleurs) les véritables raisons de la colère des manifestants plutôt que de faire dans le dilatoire et vouloir faire croire que l'opposition a tout orchestré. Certains l'interpréteraient même comme un signe de dedain à l'égard de la jeunesse sénégalaise qui serait donc incapable de s'indigner d'elle-même ou encore que le roi et sa cour ont l'indécente assurance d'avoir satisfait plus de douze millions de sénégalais parce qu'ils ont bâti des routes et des ponts ça et là, agrémentés d'un monument, d'un aéroport et d'une autoroute à péage... Mais au vu de la réaction de Sa Majesté qui dès les premières émeutes et les premiers morts a traité tout cela de "brise légère", il n'est pas sûr qu'ils veuillent écouter de façon sincère et apporter des réponses adéquates à la demande populaire en matière d'emploi, d'éducation, de justice, de santé ou encore baisser le prix des denrées de première nécéssité dont les coûts ont triplés voire quadruplés ces dernières années.

A la veille du vote de dimanche donc, l'ensemble du Sénégal est encore sous le choc de tant de violence dont il avait été épargné (exceptée la rebellion en Casamance au sud dont le reste du pays ne sait pas grand-chose) et tous les scènarios sont aujourd'hui passés en revue. Des plus pacifiques aux extrêmement chaotiques, les supputations vont bon train. Mais quoi qu'il en soit, il est aujourd'hui évident, que Wade parte ou qu'il reste à la tête du pays, que le dialogue est plus que nécéssaire pas seulement pour l'exercice du pouvoir mais aussi et surtout pour rétablir la cohésion sociale, réformer et renforcer les institutions afin de donner aux populations des dirigeants qui donneront l'exemple par leur respect des lois et leur volonté de changer la vie du peuple en mieux.

Pour suivre les élections sénégalaises www.sunu2012.sn

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